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dans l’humanité

ches immérités, et que, pour une moindre faute, il ne soit brutalisé et corrigé outre mesure ? Ce père qui exerce souvent un état dur, grossier, qui manie, à cet effet, des instruments lourds et pesants, saura-t-il se rendre compte de la portée de ses coups ? Et dans ces scènes privées, qui sont souvent si terribles, qui donc interviendra entre cet homme en fureur et ce petit être sans défense ? Les voisins ? mais ils sont persuadés que l’amour paternel atténuera ce que la colère a d’excessif. Puis, enfin, le père n’a-t-il pas le droit de reprendre et de corriger son enfant ? Ajoutez à ces considérations la crainte de s’attirer des désagréments, et vous aurez la raison de cette indifférence, de cette insouciance avec laquelle, dans certains quartiers sur tout, des gens entendent journellement des pleurs, des cris, des bruits de coups réitérés, sans plus s’en émouvoir. Ils ne comprennent pas ce qu’il y a de disproportionné entre cet emportement, cette violence et le motif puéril qui l’a provoquée.

Il est même des voisins qui prêtent l’oreille, considérant ces iniquités intimes comme un spectacle dont ils ne veulent manquer aucune des péripéties. Sans doute, quand les sévices prennent les proportions d’un crime, la rumeur publique aidant, la justice se décide à paraître. Mais, hélas ! le plus souvent, quand il n’est plus temps !

Du reste, quand elle arrive à point, que fait-elle ? Elle condamne les parents délinquants à l’amende, à la prison même ; puis, à l’expiration de leur peine, elle les réintègre dans leurs droits. De telle sorte que l’enfant retombe au pouvoir de ses persécuteurs dont la l’âge contre lui s’est encore accrue.

Des esprits sains, bien pensants, ont fait en vain ressortir le côté absurde et dangereux de cette législa-