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dans l’humanité

ment, se manifestèrent. Et, il faut le dire à regret, l’administration ne sut pas s’armer contre eux pour l’exécution de la loi nouvelle, malgré l’expérience qu’on avait faite de l’inefficacité de la loi de 1841.

Ceux qui se plaisaient à croire que la loi de 1874 allait tout changer eurent une amère déception. Le rapport des inspecteurs leur enleva beaucoup de leurs illusions. Ils reconnurent d’abord que le personnel de l’inspection était insuffisant et que, d’autre part, les milieux étaient récalcitrants, chaque intérêt particulier s’ingéniant à restreindre l’action de la loi à son profit. C’est qu’il ne suffit pas qu’une loi soit sévère : il faut encore que le public lui serve d’auxiliaire et qu’il signale toutes les infractions dont cette loi est l’objet ; car elle se trouve paralysée quand le public reste dans son indifférence et dans son égoïsme. Une fois que les inspecteurs ont le dos tourné, tout recommence.

Le public a donc le droit et le devoir de protester toutes les fois que la loi est escamotée ; et il peut toujours s’indigner : car si l’on s’indignait devant chaque injustice commise, on en diminuerait le nombre.

Ainsi donc deux obstacles s’opposèrent à la loi : l’indifférence du public et le petit nombre des inspecteurs qui n’atteignaient que le chiffre de 15. Il y eut donc, dès l’abord, impossibilité pour eux de signaler toutes les contraventions qui se produisaient. C’est ainsi que les rapports ont appris que des enfants, à Paris, travaillaient encore de treize à quatorze heures par jour dans des fabriques de fermoirs de porte-monnaie, bien qu’âgés de douze ans. Et notamment dans des fabriques de boulons et de vis, des enfants de huit à dix ans travaillaient, en temps de presse, de six heures du matin à dix heures et demie du soir.