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dans l’humanité

l’inspecteur qui veillait à l’exécution de la loi (rapport de M. Estelle en 1876) ; et, passant des menaces aux voies de fait, ils en arrivèrent à lui jeter des pierres.

En somme, ces résistances ont toutes pour racine le respect traditionnel de la puissance paternelle. Parents et patrons, les premiers pour défendre leur autorité, les seconds pour défendre leurs intérêts, se liguent volontiers pour entraver l’exercice de la loi de 1874.

Ajoutez à ces dispositions récalcitrantes le nombre toujours insuffisant des inspecteurs, le plus ou moins d’activité apporté à leurs fonctions, leur crainte de se faire des ennemis, et vous aurez la raison des infimes résultats obtenus pendant les dix-huit mois qui viennent de s’écouler. La loi n’a été applicable qu’un an après sa promulgation, suivant l’article 31.

Maintenant, il est temps de nous résumer.

J’ai démontré, pièces en mains, que l’enfant, même l’enfant légitime, n’avait qu’une apparence de droit ; qu’il était livré au double arbitraire de la famille et de la société, et qu’il n’était pas plus garanti d’un côté que de l’autre. J’ajoute que la société, en ce cas, est encore plus coupable que la famille, parce qu’en sa qualité de personnage collectif, elle est une abstraction, une entité dépouillée de toute passion, et qu’en conséquence, à l’avantage de tous et en vue d’un certain idéal de bien et de moralité, sa mission est justement de suppléer aux défections individuelles, de redresser les déviations particulières, de réparer le mal autant que faire se peut, et surtout, et avant tout, de le prévenir.

Or, l’enfant ne peut être responsable, parce que c’est un être inachevé, que sa volonté est incomplète, qu’elle est plus instinctive que rationnelle. Il a donc besoin d’une saine direction, et, si cette direction lui