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dans l’humanité

monstrueux établissements qu’on a l’effronterie de qualifier d’utilité publique.

De là une police des mœurs, un bureau des mœurs. Mais, je ne l’ignore pas, la société a des appétits : et pour les satisfaire, il lui faut des proies. Elle ne recule donc devant aucun de ces procédés sauvages.

Je trouve seulement que nous avons un rude aplomb de nous prétendre en civilisation.

On me fera remarquer qu’il est plus aisé de critiquer les lois que de les faire meilleures.

Je réponds à cela que, dès que les défectuosités d’une loi sont reconnues, on doit ne pas hésiter, soit à l’abroger s’il va lieu, soit à y apporter les modifications nécessaires.

Dès l’instant que la famille manque à son devoir, et que, pour l’enfant, les mauvais traitements remplacent les soins et la tendresse, que les mauvais exemples tiennent lieu d’enseignements moraux et que ces faits sont publiquement connus, la société, la loi, l’État, comme vous voudrez, doit arracher aussitôt l’enfant de ce funeste milieu. On ne le soustraira jamais trop tôt au spectacle de tant d’insanités. Mais comme la société ne pourrait suffire à tant de charges, et que ce serait d’ailleurs encourager les mauvais parents que de les délivrer de leurs enfants, l’État, d’accord avec les patrons, grâce aux renseignements de la police, prélèverait chaque semaine ou chaque mois sur la paye une somme proportionnelle au gain des parents pour subvenir à l’entretien des enfants.

En outre, la société promulguerait tout aussitôt l’instruction gratuite et obligatoire. Elle multiplierait les écoles professionnelles, où l’enfant peut, tout à la fois, éclairer son esprit et acquérir les connaissances techniques d’un métier, sans se démoraliser au contact de gens dont le langage et les mœurs sont souvent dissolus.