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de distendu, d’élastique, qui emmagasine tout indifféremment. C’est un bazar, c’est une boutique, c’est un bric-à-brac, où les choses les plus disparates se rencontrent. La conscience n’est plus le tribunal sévère et loyal, mais un juge taré qui donne gain de cause au plus offrant.

Alors nous entrons dans cette interminable série de non-sens, de contresens, de contradictions, de rétrocessions, qu’on décore du mot de concession, de conciliation, et dont le vrai nom est défection.

Ces faits sont plus frappants chez les hommes publics, parce qu’ils sont plus que les autres en évidence ; mais ils sont le signe d’un état général.

Oui, la conscience s’abaisse ; oui, elle s’amoindrit, parce que nous sommes une génération bâtarde. Pour quoi est-elle bâtarde ? Parce qu’on a greffé en elle l’esprit moderne sur l’esprit du moyen âge, et qu’on a voulu concilier des inconciliables. Il s’ensuit que la conscience est tirée par deux forces contraires, deux forces qui marchent en sens inverse et produisent la stagnation, ou, tout au plus, une oscillation. Dès que nous avons mis le pied en avant, nous le reportons en arrière. Ceci pourra se prolonger ainsi indéfiniment. Il nous faut pourtant sortir de là.

Nous en sortirons en élevant l’enfant autrement que nous n’avons été élevés nous-mêmes. Nous lui devons une éducation à base rationnelle et scientifique.

Comment ! s’écrie-t-on, est-ce que c’est suffisant ? Est-ce que la science répond à tous les besoins de l’âme ? Est-ce qu’elle instruit l’homme sur ses destinées ultérieures ? Quand elle essaye de l’édifier, elle le désole, le décourage et lui montre le néant ! Il va donc chercher ailleurs des solutions plus favorables.

Il est certain que la science ne peut donner que ce qu’elle a. Non, elle n’a pas encore dégagé toutes les