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Page:Deraismes - Le Theatre chez soi.pdf/221

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BAZIN.

Et le marié est tout comme, monsieur.

M. EVRART.

Mon gendre est un homme sérieux, Dieu soit loué ! Il ne s’abandonne pas à la fougue de sa passion, comme ces jeunes écervelés qui procèdent en tout sans réflexion, quittes à regretter le lendemain ce qu’ils ont fait la veille. Horace pense aux engagements sacrés qu’il vient de contracter, et je ne doute pas qu’il ne se fasse la promesse intérieure d’y être fidèle.

BAZIN.

Ah ! monsieur.

M. EVRART.

Et, quant à la mélancolie de ma fille, ne s’explique-t-elle pas par son départ prochain. Chère enfant, elle va nous quitter.

BAZIN, sententieux.

C’est dans la nature, monsieur.

M. EVRART, impatienté.

Et que diantre ! c’est aussi dans la nature de regretter son père. Comment, l’enfant pleure sa nourrice, et la jeune fille, sur le seuil de la maison paternelle, ne donnera pas quelques larmes aux parents qui l’ont élevée ? Ah ! je ne puis te dire combien cette réserve dans sa joie me touche et m’enchante. Quand je vois ma Louise rêveuse, quand une larme brille dans ses beaux yeux, je me dis que, pour les nobles natures, « l’amour n’est jamais un prétexte à l’ingratitude. »

BAZIN.

Mais, monsieur, sauf votre respect…

M. EVRART.

Allons, paix !… tu es insupportable ; ne m’ennuie plus de tes rabâchages. Fais servir le déjeuner et dis aux domestiques