Page:Des Roches - Les Missives.pdf/130

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235Alcioné prend il sa cource vers la mer ?
Et ma voisine Ætna me veut elle abimer
Au gouffre d’Encelade ? & mes Dieux domestiques
Ont ils de Briaré les cent bras tyranniques
Pour desrober mon gage, & l’emporter d’icy ?
240Eh où est maintenant ma Fille, mon soucy ?
Les Sirenes oyseaux & bien mille servantes
Avec Cyane encor sont donc toutes absentes ?
Quelle fraude est cecy ? est-ce donc là la foy
Que vous m’aviez promise en recevant de moy
245Mon pretieux despost ? la nourrice tramblante
Eschange son ennuy en crainte pallissante,
Desirant que la mort la face esvanoüir
De la terrible mere, & ne la voir ny ouir.
Elle reste immobile : en fin reprenant ame
250Dist la certaine prise & l’incertaine trame,
A grand peine ces mots luy sortirent dehors :
O fust-ce des Geans les violans effors
Que les auteurs du mal ! une perte commune
Ne blesse pas si fort que le seul malheur d’une.
255Les sœurs de vostre Fille ont conjuré aux cieux,
L’Ether plus que Phlegra luy est pernicieux.
L’envie leur a fait desirer sa ruine.
Paisible demeuroit la vierge Proserpine
Dans la forte maison, qui alors fleurissoit.
260Jamais le seil de l’huis son pied n’outrepassoit,
Servant a vos desirs la toille estoit sa tâche.
Les Sirenes donnoient à son labeur ralâche.
Le gracieux plaisir de ses rians propos
Estoit avec moy, avec moy son repos,