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BETTY PETITE FILLE

— Bien sûr quoi !… Il ne m’a pas donné c’te galette pour m’gratter un œil d’perdrix.

La fillette se fit câline :

— Raconte moi comment qu’ça s’est passé ?

Léontine se redressa pleine d’une hautaine supériorité :

— C’est pas d’votre âge !

La gamine se révolta :

— Mais j’sais, s’pèce de tourte !

Léontine leva un front offensé :

— Alors pourquoi qu’vous d’mandez…

Puis avec un sourire candide :

— V’s’êtes tout d’même maline d’avoir d’viné qu’il donnerait tant d’argent pour ça !

Il fut impossible de la tirer de ces généralités ; malgré toute sa diplomatie, Betty en fut pour ses efforts. En outre la servante commença à manifester une certaine désinvolture. Prostituée à son tour, elle se sentait élevée d’un échelon social, presque au niveau de Madame Cérisy elle-même.

La fillette hargneuse voulut briser dans l’œuf cette tentative de libération :

— Faudrait t’décider à quitter les frusques de ma mère… c’est pas à toi !

Léontine eut un geste plein de grandeur :

— Penh ! J’en aurai bientôt autant parce que j’suis