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BETTY PETITE FILLE


constata que nul ne la menaçait. Aussitôt elle reprit toute sa tranquillité, son visage redevint rieur, sa mine audacieuse. Et flâneuse, elle poursuivit sa route inlassable dans la foule compacte où flottait une odeur de mâles, d’onguents et de poudre de riz. Tout cela lentement la grisait, mettant en elle une sorte d’ivresse sensuelle.

Avec la tranquillité vint le regret de s’être montrée farouche vis-à-vis du quidam. Elle rêva de le retrouver parmi les promeneurs et en attendant, se fit de nouveau aguicheuse par le sourire de ses lèvres sanglantes.

Elle réussissait, secouant d’une passion subite et animale quiconque la croisait. On devinait en elle le besoin charnel qui se révèle, l’impatience de la bête qui s’anime.

Lentement ses sens chaviraient, ses grands yeux noirs s’embrumaient d’une buée légère, sa bouche devenait plus chaude, une humidité odorante naissait à ses aisselles.

Non loin, cinq heures sonnèrent. Elle eut peur d’être en retard et preste, avec la désinvolture de la petite Parisienne que rien n’effraye, elle s’engouffra dans la plus proche station du métro.

À son entrée en un wagon de première classe, la vue de sa figure fardée fit sourire des hommes et se détourner des dames. Tout ce monde elle le