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BETTY PETITE FILLE

Tout en effet incitait la fillette aux folies durant les longues heures du jour. C’était le mouvement hallucinant de la rue ; c’étaient les couleurs qui chatoyaient devant ses yeux à chaque coin de boulevard ; c’étaient aussi les parfums multiples et différents qui flottaient autour d’elle, la noyant dans un océan d’éréthisme. Et enfin, elle voyait continuellement l’homme lancé aux trousses de la femelle et celle-ci s’offrant sur le bord des trottoirs, poussée en cela par l’avarice et la coquetterie.

Comme tous, elle subissait les effets de cette électricité éparse qui la pénétrait, mettait en son être naissant et vigoureux, un besoin vague, jamais précis et jamais apaisé.

Alors en revenant au logis, elle cherchait auprès de la servante, une satisfaction quelconque, la première qui fût permise.

Ayant cette distraction, elle se désintéressait momentanément de l’homme, ayant compris que son âge arrêtait les audaces. Mais elle attendait son heure.

Avec la confiance naïve de l’enfant, elle s’attachait à la goton, qui lui rendait cette affection par une haine farouche et sournoise. Lentement, elle déformait son pauvre cerveau si malléable, lui infusant des goûts bizarres, des penchants hétéroclites.