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BETTY PETITE FILLE


Cependant elle nota aussitôt qu’ils rapprochaient leurs chaises et son cœur battit avec violence. Incontinent elle espéra des choses extraordinaires.

Pourtant lorsque le garçon parut, ce fut d’un timbre calme qu’elle commanda deux thés.

Léontine absolument abasourdie contemplait cette salle, les toilettes, les bijoux des femmes. Tout cela soulevait en elle une rancœur jalouse ; elle pensait à son existence difficile de souillon méprisée auprès d’une dame méprisable mais élégante. Elle se demandait si vraiment le bidet ne valait mieux que l’eau de vaisselle et l’encaustique.

Immédiatement elle ressentit plus de haine pour Betty et sa mère, surtout pour la première qui brusquement avait arraché le voile qui avait jusque-là conservé la paix à son cœur.

Elle goûta le thé et avec sa bonne jugeotte de campagnarde le reconnut exécrable ; elle s’étonna même qu’au milieu de tout ce luxe on put consommer pareil liquide insipide.

Alors elle éprouva un profond mépris pour tous ces snobs et se crut subitement supérieure à eux. L’enchaînement des idées l’amena à souhaiter les duper, à profiter de cette énorme bêtise qu’elle voyait étalée avec tant de complaisance.