Page:Des artistes, première série, 1885-1896, peintres et sculpteurs, 1922.djvu/255

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Jean-Paul Laurens, le digne pendant du Démosthène antique, et combien d'autres, jusqu'à M. Puvis de Chavannes, sûr ainsi d'une double immortalité ! Et c'est toute la série des bustes de femmes, inoubliables figures, vivants poèmes, marqués dans leur modernité tentatrice du sceau de l'énigme éternelle, et qui vont, chantant, dans une symphonisation merveilleuse de la chair, le rêve qui gonfle les gorges naissantes ou épanouies, ou qui se lève de l’aromale beauté des nuques.

Cette fois, il faut bien que le public admire. S'il ne sait pas encore ce que dans ces œuvres il y a d'effort et d'art conquérant, du moins est-il étreint par un charme sensuel, par des secousses d'émotion physique qui, malgré lui, domptent et violentent son ordinaire inertie mentale.

En même temps le public apprend qu'Auguste Rodin travaille à une porte colossale qui lui a été commandée pour le Palais des Arts décoratifs. Cette porte, on la décrit, même avant que l'artiste en ait fixé la forme et déterminé l'arrangement. Chacun sait que les motifs qui s'y dérouleront lui sont inspirés par l'Enfer du Dante. Autour de cette entreprise grandiose se crée une véritable agitation, accrue encore par la connaissance de quelques fragments troublants. De temps à autre, dans des expositions libres, apparaissent