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PRIÈRES.

C’était triste, mais grand ! désert, mais plein de charmes !
L’eau, filtrante au rocher, faisait un bruit de larmes ;
L’étoile, dans le lac se creusant un miroir,
Rayonnait, on l’eût dit, de l’orgueil de se voir.
De ces palais ouverts, sans gardiens, sans serrures,
La lune illuminait les pompeuses parures ;
Et sa lampe éternelle, aux reflets purs et blancs,
Montrait les profondeurs aux pèlerins tremblans.


Ce soir-là tout aimait, tout s’empressait de vivre ;
Tout faisait les honneurs des chemins doux à suivre :
L’océan de la nuit se balançait dans l’air ;
Pas un souffle inclément, enfin ! pas un éclair
N’agitait des aiglons les aires toutes pleines,
Et les fleurs se parlaient : le bruit de leurs haleines,
Dans l’herbe, ressemblait à des baisers d’enfans
Qui s’embrassent entre eux, rieurs et triomphans.
Là, j’avais dit aux miens, j’avais dit à moi-même :
« Dieu qui nous a voués aux départs, Dieu nous aime ;
Il enlace nos jours et les mains dans les mains,
Nous refait de l’espoir aux douteux lendemains. »