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LES PLEURS.


Mais tu n’entendras pas mes plaintes interdites.
Dit-on au passereau de haïr, d’avoir peur ?
Tes oreilles encor sont tendres et petites,
Enfant ! je ne veux pas méchantiser ton cœur.

Garde-le plein d’écho de ma voix maternelle :
Dieu qui t’écoute encore ainsi m’écoutera.
Ô ma blanche colombe ! entr’ouvre-moi ton aile ;
Mon cœur a fait le tien ; il s’y renfermera ;
Car ce serait affreux et pitié de t’apprendre,
Quand tu baises mes pleurs, ce qui les fait couler ;
Va les porter à Dieu, sans chercher à comprendre
Ce qu’une larme pèse et coûte à révéler !

Tout pleure ! et l’innocent que le torrent entraîne,
Et ceux qui, pour prier, n’ont que leurs repentirs ;
Peut-être en ce moment les soupirs d’une reine,
Sur la route du ciel, rencontrent mes soupirs.

Mais que l’oiseau des nuits t’effleure en sa tristesse :
Il passe, mon Ondine, il passe avec vitesse :
Sur tes traits veloutés j’aime à boire tes pleurs ;
C’est l’ondée en avril qui roule sur les fleurs.