Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, VI.djvu/105

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intelligible a tout le monde, & de ne rien omettre, ny ſuppoſer, qu’on doiue auoir appris des autres ſciences. C’eſt pourquoy ie commenceray par l’explication de la lumiere & de ſes rayons ; puis, ayant fait vne brieue deſcription des parties de l’œil, ie diray particulierement en quelle ſorte ſe fait la viſion ; & en fuite, | ayant remarqué toutes les choſes qui ſont capables de la rendre plus parfaite, i’enſeigneray comment elles y peuuent eſtre adiouſtées par les inuentions que ie deſcriray.

Or, n’ayant icy autre occaſion de parler de la lumiere, que pour expliquer comment ſes rayons entrent dans l’œil, & comment ils peuuent eſtre détournés par les diuers cors qu’ils rencontrent, il n’eſt pas beſoin que i’entreprene de dire au vray quelle eſt ſa nature, & ie croy qu’il ſuffira que ie me ſerue de deus ou trois comparaiſons, qui aydent a la conceuoir en la façon qui me ſemble la plus commode, pour expliquer toutes celles de ſes proprietés que l’expérience nous fait connoiſtre, & pour deduire en ſuite toutes les autres qui ne peuuent pas ſi ayſement eſtre remarquées ; imitant en cecy les Aſtronomes, qui, bien que leurs ſuppoſitions ſoyent preſque toutes fauſſes ou incertaines, toutefois, a cauſe qu’elles ſe rapportent a diuerſes obſeruations qu’ils ont faites, ne laiſſent pas d’en tirer pluſieurs conſequences très vrayes & très aſſurées.

Il vous eſt bien ſans doute arriué quelque fois, en marchant de nuit ſans flambeau, par des lieux vn peu difficiles, qu’il falloit vous ayder d’vn baſton pour vous conduire, & vous aués pour lors pû remar-