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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

À présent, le malheureux sait tout. Ondine a été lui dire à Bruxelles que sa sœur est mourante. Et il doit demeurer à la chaîne…, et il divague, et il brame, et au lieu d’essayer de réconforter sa femme, il double la dose d’amertume dans la coupe qu’elle boit.

Elle crie vers lui :


Il y a un article de tes deux chères dernières lettres qui m’a donné l’envie de sauter jusqu’au ciel. Comment ! tu le crois inutile et presque onéreux parce que tu respires maintenant et que tu ne tombes plus de lassitude. Véritablement, cher ami, il se passe d’étranges choses dans ton jugement sur toi-même, qui en as un si sain sur les autres… Tu dois avoir des remords de ne pas fendre le bois et pétrir le pain des acteurs. On n’est pas de ta force. D’après ton appréciation, je ne sais pourquoi nous osons nous plaindre des horreurs qui nous ont été faites : nous devons être bien reconnaissants de ce qu’on nous a laissé la vie et un peu d’eau… Ah ! Valmore, pourquoi es-tu ainsi, mon bon ange ? Et que parles-tu de Chartreuse ? Là aussi il y a des hommes. Va, crois-moi, ils se ressemblent tous. Ah ! si tu m’aimais comme je t’aime, tu ne parlerais pas de Chartreuse !


Il a fallu, encore une fois qu’elle quittât le chevet d’Inès pour celui de son mari, qu’elle allât de l’un à l’autre porter ses tisanes et ses baumes.

Ah ! que l’on détesterait Valmore, si la tendresse qu’a pour lui Marceline n’était pas réciproque ! Mais elle l’est. Ces deux vieux époux s’aiment. Ils pensent bien réellement avoir fait un