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Page:Desjardins - Les caisses populaires, Cie. D'Imprimerie Ottawa, 1912.djvu/20

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mais n’est-il pas vrai aussi que les Banques ne font pas crédit au peuple travailleur, ne lui prêtent jamais et ne sont que des réservoirs où s’engloutissent les épargnes populaires pour aller ensuite enrichir les commerçants et les industriels, tandis que le peuple est la victime des usuriers et des cormorans de toute espèce qui spéculent sur son dénuement et profitent de son isolement économique. Dans l’organisation financière actuelle il manque une cellule indispensable, celle où le peuple pourrait lui aussi se grouper, mettre en commun ses modestes épargnes et s’entr’aider par des prêts dans des moments difficiles, ou encore féconder ses énergies productives. Or, la Caisse Populaire offre cette cellule nécessaire. Elle est véritablement la banque des travailleurs où ils doivent mettre leurs modestes épargnes et à laquelle ils doivent s’adresser soit pour féconder leurs initiatives, soit pour satisfaire à leurs besoins de crédit. S’imagine-t-on par hasard que dans les pays d’Europe où, comme je l’ai dit tout à l’heure, il y a tant de milliers de Caisses Populaires, il n’y a pas de Banques et que c’est ce qui explique la multiplicité de ces Caisses ? Que l’on se détrompe, que l’on chasse bien vite cette illusion, puisqu’en France seule on compte au moins trois mille banques et succursales de Banques sur un territoire bien plus petit que celui du Canada. Et quand Léon XIII, cet illustre Pontife que l’on a surnommé à juste titre le Pape des ouvriers, recommandait, en insistant auprès du clergé de tous les pays, de favoriser l’organisation de telles Caisses, ignorait-il l’existence des Banques ? Non, assurément. Cet argument n’en est pas un, ou cette objection est absolument nulle.

Mais vous, de la province d’Ontario, me direz peut-être qu’il n’y a pas de loi dans votre Province pour autoriser l’organisation de ces Caisses Populaires. Je le sais, et je le regrette, mais ce n’est pas une objection insurmontable. Pendant six années La Caisse de Lévis a fonctionné sans une loi et ne s’en est pas portée plus mal. C’est même ses succès qui ont éclairé nos législateurs et les ont engagés à voter la loi de 1906, loi dont je leur suis reconnaissant et qui est vraiment à l’avantage du peuple. Organisez de ces Caisses dans vos paroisses, groupez-vous et bientôt vos députés vous donneront une loi. J’en vois deux à mes côtés ici (MM. Mageau et Racine) et j’espère qu’ils sauront réveiller leurs collègues de la Législature et leur faire voir que la province d’Ontario n’est pas tout l’univers, et qu’il se passe ailleurs des choses