Page:Desmarets - Clovis ou la France Chrétienne.djvu/64

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Sont-ce là ces grands biens, ces signes apparens
Des promesses du ciel, dont vous m’estiez garens ?
Je vous fiay mon cœur ; je vous fiay ma vie.
Rendez moy la splendeur que vous m’avez ravie.
O ! Celestes decrets, ordres du tout-puissant,
Fus-je donc criminelle, en vous obeïssant ?
Seigneur, doy-je tousjours esprouver ta colere ?
Dés que j’ouvris les yeux, je vis meurtrir mon pere,
Mon sang verser mon sang ; et depuis le berceau
J’ay supporté les yeux de nostre fier bourreau.
Pour servir les autels, un saint zele m’emporte :
Le ciel me fait sentir une haine plus forte.
Il s’arme tout d’éclairs : il se fond en torrens :
Il m’offre des trompeurs, quand je fuy des tyrans.
Que feras-tu, Clotilde, amante miserable
D’un prince autant ingrat, qu’il me parut aimable ?
Ah ! Qui me fit choisir ce traistre pour espoux ?
L’assassin de mon sang m’estoit encor plus doux.
Alors son noble cœur, detestant les perfides,
Fit verser à ses yeux mille perles liquides.
Le desespoir l’attaque ; et les airs sont frapez
De ses tristes sanglots, cent fois entrecoupez.
Une honte cruelle à son ame s’attache ;
Et dans le bois prochain confuse elle se cache.
Elle succombe enfin sous tant de maux pressans.
Son regard s’affoiblit : elle perd tous les sens.