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LA COMTESSE DE WINTERFELD.

comtesse de Winterfeld. Mais cette union brusquée, pour ne pas dire subtilisée, ne tourna pas mieux que le mariage de sa sœur avec M. Constantin. C’est ce qui semble résulter de ce passage d’un dialogue entre Pimpette et sa mère : « Tu sçais bien, ma pauvre enfant, toutes les mesures que j’ai prises avant de te livrer entre ses bras, tu sçais aussi que l’ambition que j’ai eue de te faire comtesse avec la crainte de laisser échapper une occasion si favorable, ont été la seule cause de ton malheur ; tu as bien dû connoître que je n’ai rien épargné pour te rendre heureuse[1] ». Madame Dunoyer, qui avait dû reprendre sa fille, s’était retirée près de la Haye, à Woorburg, où elle mourut au printemps de 1719[2]. Madame de Winterfeld n’avait plus de motif de rester en Hollande, elle rentra en France où se trouvaient tous les siens.

Arouet ne garda pas rancune à sa maîtresse. Il parle en termes excellents de cette tête légère qui avait fini par s’assagir et forcer l’estime et le respect de tous. « L’aînée, nous dit-il, est morte à la communauté de Sainte-Agnès, honorée et chérie ; l’autre est pensionnaire du roi, et vit d’ordinaire dans une terre qui lui appartient, et où elle nourrit les pauvres ; elle s’est acquis, auprès de tous ceux qui la connaissent, la plus grande considération. Son âge, son mérite, sa vertu,

    pseudonyme de Madame Kurkila. Cavalier, qui avait commencé par être aide de cuisine, se cache sous celui de Mitronet, et la jeune fille sous celui d’Etepnip, l’anagramme de Pimpette. T. V, p. 277 à 357.

  1. Madame Dunoyer, Lettres historiques et galantes, t. V. p. 116. Dialogue de madame D. et sa fille.
  2. Entretiens des ombres aux Champs-Élysées (Amsterdam, 1722), 4e édition, p. 409.