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Page:Desormeaux - La Plus Heureuse Femme du monde.pdf/149

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— Vous souffrez… et je donnerais ma vie pour vous épargner une souffrance !… dit-il à voix basse, timidement, avec cet accent sympathique qui part du cœur…

Et moi, je répondis en élevant vers lui mes yeux rougis de larmes :

— Je suis au désespoir !

Il se rapprocha tout près, et, très-vite, très-bas :

— Que puis-je ?… Dites un mot : les dangers, je les braverai ; les obstacles, je les vaincrai ; l’impossible, je le tenterai… Oh ! si je suis compté pour quelque chose dans votre estime, ne me repoussez pas !… En grâce, parlez, parlez !… disait-il d’un ton suppliant.

— Pas ici… répondis-je irrésistiblement entraînée.

Aline, n’oubliez pas dans quelle extrémité j’ai accepté ce secours, qui me sembla nous être envoyé par Dieu même, dans notre profonde détresse !

J’indiquai à Albert l’adresse de Marie…

Je n’avais pas le choix des moyens ; il ne venait pas chez moi, même en visite : M. Albert Morrans, comme beaucoup d’autres jeunes hommes, simplement admis à nos grandes soirées, était porté sur nos listes de bal, et je recevais ses cartes.

Fils d’un général mort au champ d’honneur dans la terrible campagne de Russie, Albert suivait avec distinction la carrière où son père avait laissé de glorieux souvenirs. À vingt-sept ans qu’il avait à l’époque dont