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Page:Desormeaux - La Plus Heureuse Femme du monde.pdf/61

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une lettre de madame sa mère, et j’entrai à son service.

Thérèse avait appris de la femme de chambre de madame la marquise, à raccommoder la dentelle ; elle excellait, ainsi que j’ai eu l’honneur de vous le dire, à tous les travaux d’aiguille ; elle me pria de lui procurer de l’ouvrage chez les marchands ; j’y réussis, et ne voulant devoir son existence qu’à elle-même, elle passait ses jours et une partie des nuits au travail.

Mes visites rares ou fréquentes, suivant que mon devoir me le permettait, interrompaient seules pendant les premiers mois l’isolement affreux, la profonde retraite où vivait, reléguée sous les combles, la jeune fille accoutumée dès l’enfance aux distractions, au mouvement, à l’espace d’une grande maison !

Que de larmes ont coulé en silence ! car elle ne se plaignait jamais, n’accusait jamais personne ; jamais un mot, une question… L’altération de ses traits, l’abbattement de ses regards accusaient ses souffrances intérieures ; mais sa bouche ne les révélait pas.

Pendant les cinq mortels premiers mois qui s’écoulèrent depuis son arrivée à Paris, elle ne sortit pas une seule fois… Elle avait honte d’elle, de tous regards humains, des miens même. Qu’elle a souffert, mon Dieu, jusqu’à la naissance de sa fille ! Et elle n’avait pas encore dix-huit ans !

De ce moment, elle fut sauvée du désespoir, la vie