Page:Desportes - Premières œuvres (éd. 1600) II - Les Amours d'Hippolyte.djvu/18

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  AMOURS  


Ton depart m’a trop fait connoistre
Le bon heur où je soulois estre,
Quand douce tu m’allois guidant,
Et que, sans languir davantage,
Je devois, si j’eusse esté sage.
Perdre la vie en te perdant.

Depuis que tu t’es éloignée,
Ma pauvre ame est accompagn~
De mille épineuses douleurs :
Un Ceu s’est espris en mes veines,
Et mes yeux changez en fontaines
Versent du sang au lieu de pleurs.

Vil soin caché d~ns mon r.ourage
Se lit sur mon trisle visage,
Mon teint plus palle est devenu;
Je suis courbé comme une souche,
Et, sans que j’ose ouvrir la bouche,
Je Ineurs d’un supplice inconnu.

Le repos, les jeux, la liesse,
Le peu de soin d’une jeunesse,
Et tous les plaisirs m’ont laissé;
Maintenant rien ne me peut plaire,
Sinon, devôt et solitaire,
Adorer l’oeil qui m’a blessé.

D’autre sujet je ne compose,
Ma Inain n’écrit plus d’autre chose,
Là tout mon service est rendu,
Je ne puis suivre un autre voye,
Et le peu de tans que j’employe
Ailleurs, je l’estime perdu.