Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/104

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décision de ne plus la fréquenter ne changerait pas, il s’abandonnait à la joie douloureuse de l’évoquer, de la contempler et de l’aimer par le souvenir.

Une sœur cadette de Marguerite mourut presque subitement. Une visite s’imposait à Paul. Il arriva le soir. La première pièce, en entrant, était obscure. Il ne vit que la porte d’une seconde chambre où brûlaient des flammes scintillantes de cierges autour du lit blanc poussé contre les tentures mortuaires. Il en ressortit après quelques instants de prières. Il vit une femme accoudée sur la table. Il lui toucha légèrement l’épaule de la main. Elle se retourna vivement. Et avant qu’il eût compris ce qui lui arrivait elle passa impulsivement ses bras autour de son cou, et pleurait, sanglotait sur son épaule. C’était Marguerite. Cette mort subite de sa sœur la remuait jusqu’au fond d’elle-même. Elle s’accrochait à la première sympathie certaine, à l’affection sincère et passionnée. Un mouvement profond et instinctif l’avait jetée vers lui.

Et Paul croyait que ce soir funèbre avait éveillé subitement chez Marguerite l’amour pour lui et que la mort les avait unis indissolublement d’un lien sacré. Cette scène avec