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Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/115

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tombées reposaient sur l’herbe d’un vert tendre et intense. Ce contraste lui était particulièrement sensible car il lui semblait alors que l’automne jetait ses oripeaux aux couleurs vives sur la robe neuve du printemps.

Puis en hiver, il y avait les pins sombres dans les paysages blancs, des lacs, des plaines qu’entouraient des hauteurs couvertes de forêts rousses. La magnificence grave et sévère des nuits lui plaisait. Une maison dont les fenêtres étaient illuminées à l’intérieur par des lampes à abat-jour, avec des corniches, un toit, des cheminées fumantes coiffées de la neige immaculée, et se découpant sur le ciel d’un bleu royal où scintillaient les étoiles, crépines d’argent, lui paraissait le plus beau spectacle du monde.

Le matin, il s’arrêtait souvent sur un pont que je connaissais bien, s’accoudait à la balustrade, et regardait pendant des heures au fond du ravin. Il voyait passer là, sur des rails, tous les trains à la suite dans une cour immense de gare. Une fumée blanchâtre sortait à gros bouillonnements du tuyau des locomotives d’un noir luisant et vernissé qui se promenaient là, parmi ces nuages opaques, et en même temps translucides et laiteux lorsque le soleil mettait à l’intérieur une lumière