Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/140

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cependant Pierre Langelier est un dialecticien et un « debater » parlementaire très dangereux et très violent, de beaucoup d’énergie, d’activité et d’entrain, par intervalles surtout. Courtois et poli, il ne conduit pas la politique à la manière des arrivistes qui est dure et brutale ; un côté gentilhomme en lui refuse de s’abaisser jusqu’à certaines tactiques, de poursuivre son avantage trop loin, ou de frapper des coups d’aveugle. Le parlement lui paraît plutôt une espèce de cour de justice dressée devant le peuple d’où les avocats, après avoir bien défendu leurs clients et tout fait pour gagner leur cause, s’en retournent ensemble en jasant amicalement de choses diverses. Ne manquant pas d’humour pour détendre les situations, il n’a en outre aucun sentiment d’inimitié vraie pour personne.

Mais ce matin Pierre Langelier n’est pas aussi dispos. Plusieurs problèmes l’occupent, qu’il n’est pas certain de pouvoir résoudre au mieux pour le parti. Il souffre de surmenage, de l’accumulation incessante du travail, d’être attelé du matin au soir comme un porte-faix. Et surtout la présence de Jean Dorion dans son conseil lui cause une inquiétude sourde et latente. Jusque là il avait reconnu dans ses collègues des inférieurs ;