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Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/22

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craintive. Torturée par l’angoisse et la lente souffrance, elle dépérissait, ses yeux se cernaient.

Mais le régiment de mon père, après des marches forcées jusqu’à Laprairie, s’immobilisait, était bientôt débandé. Fécite fut la première à apercevoir au retour le beau soldat, à courir au devant de lui, à l’embrasser, suffoquée d’une joie qui faisait bondir son pauvre vieux cœur.

Louis se maria bientôt à son tour, et la quatrième génération commença à croître dans la maison. Fécite ne se rassasiait jamais de contempler les jeunes sourires, les chairs fraîches et potelées des bébés, l’épanouissement progressif de la vie. Son affection grandissait avec l’augmentation de la famille, elle enveloppait chacun des liens subtils et forts de son amour. Comme autrefois, la vieille servante soignait les fièvres, les rougeoles, les scarlatines et les croups, toutes ces maladies enfantines qui éclataient subitement, en épidémie, parmi ce petit monde grouillant et capricieux. C’est alors qu’elle se battait farouchement et sauvagement avec la mort, passant d’interminables nuits blanches à entendre gémir, à prier, à calmer, à offrir les médecines contre lesquelles se révol-