Page:Desrosiers - Âmes et paysages, 1922.djvu/42

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aspirait à la communion spirituelle, aux effusions passionnées et romantiques suivies de silences pendant lesquels on continue à se fondre et à se comprendre. Un peu de mélancolie lui aurait plu dans ces moments ainsi remplis d’ivresse : on peut mourir d’un cœur brisé, et, si souvent, l’aimé passe, inattentif au destin, sans s’arrêter et sans sourire. Elle se voyait avouant en de tendres missives, avoir conservé précieusement une fleur dans un livre, ou regardé longtemps, le soir, Venus, l’étoile convenue, scintiller dans le firmament bleu.

Naturellement, Cécile avait une amie intime avec qui la correspondance ne chômait pas ; et, naturellement aussi, après avoir promis de tout se dire, chacune oubliait ses plus importantes confidences. Mais, dans son journal, cette touchante ingénue se reprenait, notant toutes ses rencontres, ses troubles intérieurs et nuageux, et, à son insu, la curiosité et le désir persistants d’aimer ou d’être aimée sans retard.

Par malheur, à sa sortie du couvent, Cécile ne se trouva pas dans un lieu propice à l’exercice de ses innocentes roueries. La résidence paternelle, hélas ! était située au bout d’un rang, le long d’une petite rivière, solitaire