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IROQUOISIE

Le Gouverneur obtient l’adhésion du conseil à sa politique de paix. Et quelques capitaines lui ayant donné l’assistance de leurs harangues, résolution est prise de libérer les prisonniers. Le Réconcilié, deux autres chefs, les conduiront en leur pays ; ils apporteront des présents pour la réparation. Ou plutôt, pour garantir la vie de ces ambassadeurs, l’un des prisonniers iroquois demeurera en otage jusqu’à leur retour. Puis, comme les ambassadeurs demandent que des Français les accompagnent, et que plusieurs s’offrent pour le voyage, Champlain choisit Pierre Magnan.

Le 24 juillet, Le Réconcilié, deux autres capitaines, Pierre Magnan, l’un des prisonniers iroquois, quittent Cap du Massacre pour l’Iroquoisie. « Cet arrêt, dit Sagard, consola merveilleusement tous les sauvages portés à la paix »[1]. Ils espèrent que le traité ne sera pas rompu.

Cette ambassade court à un échec sanglant. Champlain laisse deux versions de l’affaire. La seconde lui paraît la plus probable. Le Réconcilié avait un ennemi mortel dans la personne d’un Algonquin de l’Île. Celui-ci aurait couru en Iroquoisie où il avait des parents ; se disant grand ami de la paix, il avait demandé à ses hôtes de ne placer aucune confiance dans les paroles du Réconcilié ; le voyage de celui-ci, disait-il, n’avait d’autre but que l’espionnage ; il voulait revenir plus tard à la tête d’un détachement de guerriers. C’est lui qui était l’auteur des mauvaises relations actuelles entre les deux tribus ; il avait tué deux Français à Québec en 1617. Alors les Iroquois auraient attendu les ambassadeurs. L’eau bouillait en une grande chaudière dans l’une de leurs cabanes. Les Algonquins y entrent avec Pierre Magnan. Ils s’assoient auprès du feu. Un Iroquois demande au Réconcilié s’il a faim ; sur sa réponse affirmative, ils lui coupent des lambeaux de chair sur les bras, les laissent un temps dans la chaudière, l’obligent à les manger ; ils répètent l’opération pour les cuisses et d’autres parties du corps. La mort survient bientôt. Pierre Magnan, le premier Français qui

  1. Sagard, Histoire du Canada, p. 444.