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les opiniâtres

par les armes à feu. Ils ramassèrent dans l’herbe les quartiers de viande saignante, les hissèrent sur leurs épaules, coururent au canot.

Ysabau se précipita vers François. Elle tremblait.

— Tu n’aurais pas tiré ?

— Moi ? Les Iroquois ont compris, eux.

— Mais c’est la paix.

— Oui, je sais. La paix maudite.

Les Iroquois se promenaient dans la province comme en pays conquis. Au passage, ils commettaient des vols, massacraient le cheptel, bravaient les colons accourus. Ils tuaient à vue l’Algonquin que les Français avaient jusqu’ici jalousement protégé. Parmi les victimes, la colonie comptait aussi une couple de Français surpris isolément et immolés comme en l’ancien temps.

David Hache se présenta en compagnie de quelques colons. Les coups de mousquet les avaient alarmés ; anxieux, ils se tenaient sur le rivage à interroger et à commenter.

Le canot iroquois descendait le courant. Des clameurs fusèrent soudain. Sept autres embarcations avaient paru et de conserve, elles remontèrent le fleuve. Plusieurs guerriers pagayaient dans chacune, et, au milieu, s’entassaient des captifs, des sauvagesses et leurs enfants.

La flottille s’arrêta en face du défriché. Instantanément, les Français se dispersèrent, se postant sous les saules, leurs mousquets amorcés. Ils observaient les mouvements des ennemis, prêts à repousser un débarquement. Femmes et enfants avaient fui dans les maisons. Les Iroquois hésitèrent longtemps, puis, tout à coup, poursuivirent leur route. François examinait les canots.

— Mais ce sont les derniers Hurons qui partent ! s’exclama-t-il.

Parler de cette affaire ou manier un fer porté au rouge, quelle différence pour François ? D’autre part, qui ne se souvenait dans la colonie des