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Florence, qui ignorait probablement le refus qu’on avait fait à Rome, donna son autorisation, et, chose assez remarquable, sans faire aucune des corrections que les censeurs Romains avaient cru devoir faire ; et les Dialogues parurent enfin en 1632.

Ces Dialogues contiennent un examen raisonné des deux systèmes astronomiques de Ptolémée et de Copernic, et sont censés avoir lieu entre deux savants de l’école de Galilée, Salviati et Sagredo, et un philosophe péripatéticien nommé Simplicius. Celui-ci reproduit les arguments de la philosophie scolastique et combat les doctrines et le système de Galilée, dont les deux autres soutiennent la vérité. Les raisonnements de Simplicius, ses explications, ses théories, ses conclusions, sont presque toujours ridicules ou absurdes ; pendant que les arguments des deux autres interlocuteurs sont toujours lucides, bien déduits et presque toujours exacts, même au point de vue des progrès énormes que la science a faits depuis deux siècles. Eh bien ! malgré cela, malgré cette supériorité de lumières et de raison attribuée aux défenseurs de la vérité scientifique ; malgré cette infériorité de talent et de connaissances exactes attribuée au champion de l’erreur, celui-ci a l’air d’avoir remporté la victoire, et les autres font l’effet d’avoir cédé à ses arguments, dont pourtant la faiblesse et la fausseté ont été parfaitement évidents pour le lecteur. Ce résultat inattendu est très remarquable. On voit évidemment que Galilée a voulu convaincre son lecteur, mais ne tirer aucune solution explicite, pour lui laisser, en quelque sorte, la responsabilité de la déduction. On voit que Galilée redoute quelque chose, qu’il ne se sent pas libre d’émettre explicitement toute sa pensée, qu’il craint de pousser le raisonnement à sa dernière limite.

On devine, derrière Simplicius, ce terrible pouvoir Inquisitorial qui s’étendait à tout, qui disséquait l’esprit, l’âme, la pensée ; qui ne s’appliquait qu’à détruire le libre arbitre intellectuel, et qui était redoutable particulièrement aux hommes supérieurs, aux génies hors-ligne ; qui a mis tant de fois hors la loi, hors l’humanité, les hommes qui ont aggrandi le champ des connaissances humaines, élevé l’intelligence générale, instruit les nations, illuminé la science, dompté la nature, les hommes enfin qui, par leurs conceptions hardies, profondes ou sublimes, semblaient avoir