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venait de lire de ses propres yeux l’accusation diffamatoire, par le supplier de n’en rien faire jusqu’à ce qu’il eût vu V. G. elle-même à Rome, où il se rendait alors. Franchement, Mgr, que diraient-ils ?

Ah ! voilà comme on se traite réciproquement dans le Clergé, derrière le rideau, quand on exige des laïcs un respect si profond et une soumission d’esprit si complète pour des hommes que l’on va tranquillement représenter à Rome comme acheteurs et achetés !

On nous dénie le droit de nous plaindre publiquement de choses injustes, d’insultes publiques même faites par des prêtres, quand les Évêques refusent d’intervenir ou même tolèrent on encouragent ces choses ; et quand une fois on est à Rome, et que l’on se croit bien sur du secret quant à nous, on se jette le déshonneur à pleins pamphlets !  !

Il ne nous est pas permis de toucher à la robe du prêtre même quand il s’égare gravement, et voilà que l’on fait circuler avec le plein assentiment de l’Évêché, dont l’organe officiel l’annonce, un libelle où l’on nous montre les prêtres du Séminaire sous les plus noires couleurs ! La seule chose que l’on n’ait pas faite, dans ce libelle, si clairement quoiqu’indirectement approuvé par V. G., c’est d’attaquer les mœurs de la maison, mais je sais que la chose était déjà faite à Rome ! Serions-nous donc plus obligés de les respecter que leurs supérieurs ou leurs confrères d’ici qui les déshonorent ?

Mais si la moitié seulement de ce que l’on reproche aux prêtres du Séminaire, dans ce honteux pamphlet, est vrai, comment donc les a-t-on laissés tranquillement exercer le ministère depuis vingt ans ? S’ils ont si outrageusement violé tous leurs devoirs envers Dieu, envers l’Église, envers le Pape, envers leur Évêque diocésain et envers leurs paroissiens ; s’ils n’ont fait que mépriser l’autorité, désobéir, tromper, scandaliser et mentir, comme l’affirme explicitement l’auteur de la « Comédie Infernale, » pourquoi donc ne les a-t-on jamais interdits ? Bien plus ! Comment V. G. a-t-elle pu si souvent, dans des lettres pastorales que j’ai sous les yeux, appeler d’aussi scandaleux prêtres : « ses chers, illustres et bien aimés coopérateurs dans le saint ministère, et les vétérans du sanctuaire ? »

S’il est vrai que les prêtres du Séminaire aient abandonné les Irlandais mourant du typhus en 1849, comme l’affirme un prêtre canadien dans un mémoire reproduit par la « Comédie Infernale, » les lettres pastorales ont donc toujours donné le change au public quand elles parlaient du dévouement des « vétérans du sanctuaire » comme des autres, dans les temps d’épidémie ! Y aurait-il donc entente dans le Clergé pour qualifier toujours de saints hommes ceux que l’on sait être indignes dans le secret des grilles ?

Et puis s’il est vrai qu’il y a déjà plus de cinq ans que le pape ait aussi vertement blâmé le Séminaire que l’affirme l’auteur de la « Comédie infernale » ; s’il est vrai qu’à la même époque le cardinal Barnabo les ait aussi persifflés sans merci, et les ait condamnés comme désobéissants et indisciplinés, comment donc se fait-il que leur procès dure encore ? Comment donc le séminaire réussit il à détourner une condamnation éclatante s’il n’a que des torts, des mensonges et des hontes dans son passé immédiat ?

Quoi, de si grands coupables ne sont pas encore flétris et punis à Rome après 20 ans d’une lutte dans laquelle ils n’ont eu absolument rien de bon à dire ? Mais à quelle espèce de juges ont-ils donc affaire ? Car il n’y a pas de milieu ; ou il n’y a pas de justice à Rome ou, si l’auteur de la « Comédie infernale » a raison dans l’ensemble et dans les détails, si le Séminaire est aussi inexcusable qu’on le représente sur tous les points, avec l’abandon, par dessus le marché, des Irlandais mourant par centaines, il y a longtemps qu’il devrait être irrévocablement condamné et flétri ?

Serait il donc vrai qu’il ne se maintînt à Rome qu’en y jettant l’argent à pleines mains, ce que des gens qui se prétendent bien informés nous affir-