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blâme ne serait-il pas violent dans la forme, qu’il est encore répréhensible en droit canonique du moment qu’il y a quelqu’un publiquement désigné dans une église à l’attention de ses voisins d’une manière défavorable. Ceci est trop élémentaire en droit ecclésiastique pour que V. G. ne l’admette pas. Et ce qui est aussi évident, c’est que l’influence indue que le Clergé exerce au nom de la religion dans les affaires temporelles, vicie tout le système constitutionnel, nullifie pratiquement les institutions libres, met en quelque sorte tout le système politique entre les mains du Clergé ; et l’on a vu cent fois ce que le Clergé sait faire des peuples qu’il contrôle. Il n’est satisfait de son œuvre que quand il les a amenés à croupir dans l’ignorance et la superstition.

Je comprends que je puisse paraître importun à ceux que je vois si peu disposés d’être justes. Je comprends surtout que je n’ai que mauvais vouloir et souvent haine violente à espérer de ceux auxquels je me permets de rappeler les devoirs qu’ils violent si souvent dans l’intérêt de leur suprématie temporelle. Je me suis depuis longtemps convaincu que l’autorité ecclésiastique aime encore moins que l’autorité laïque à s’entendre dire franchement et fermement la vérité ; mais ce n’est pas là une raison pour se taire quand des circonstances graves exigent que l’on rompe le silence.

J’ai d’ailleurs de trop grands exemples devant les yeux pour reculer devant un devoir ou l’exercice d’un droit. Je vois trop souvent les ecclésiastiques s’obstiner dans leurs torts les plus évidents pour céder la moindre parcelle de mon droit le plus certain, celui de dire la vérité quand l’occasion le requiert. L’été dernier même, un de mes amis entendait un curé du diocèse de Trois-Rivières dire en chaire à ses paroissiens : « Vous savez, mes frères, que nous ne nous rétractons jamais ! » Je savais cela depuis longtemps, mais je n’en avais jamais entendu ni lu l’aveu. Et V. G. me permettra bien de lui dire que j’ai pu difficilement ne pas reconnaître un peu ses propres habitudes dans la sentence peu adroite que je viens de citer. Mais il n’en devient que plus nécessaire de rappeler leurs torts à ceux qui proclament ainsi leur détermination bien arrêtée de ne pas les admettre.

Ce qui s’est passé ces derniers mois même à propos du décret de Rome sur la longue lutte de V. G. contre la maison de St. Sulpice démontre assez nettement ce que je dis ici. Dès l’arrivée de ce décret que V. G. savait pourtant avoir un caractère évident de finalité, n’a t-elle pas, si je suis bien informé, fait de nouvelles représentations à Rome pour en arrêter l’effet ? Et n’a-t-il pas fallu que l’on fit signifier de Rome à V. G. qu’elle ne serait plus reçue à prolonger une résistance qui n’avait plus de raison d’être ; et qu’il ne lui restait qu’à se soumettre ? Voilà un bien grand mot, Mgr, dont nous avons beaucoup entendu parler, mais que, si j’en crois l’information apparemment très sûre que l’on m’a donnée, V. G. semble bien plus prêcher de parole que d’exemple. Les prétextes que V. G. a imaginés pour reporter à Rome une affaire jugée, font rire les hommes sérieux et démontrent bien clairement combien il Lui est impossible de céder jamais sur quoique ce soit !

Au reste cet avis donné à V. G, si semblable à celui que j’ai reçu à son instigation, a procuré, je dois le dire, un moment de satisfaction à ceux à qui l’on en a dit autant quoiqu’on se fût soigneusement abstenu de juger régulièrement leur cause. V. G. au moins ne s’est vue condamner qu’après plusieurs années d’une lutte ou les deux parties ont été longuement et contradictoirement entendues, pendant que nous avons reçu la notification d’une condamnation avant tout avis de l’accusation nouvelle que l’on avait adroitement substituée à la question soumise. Or nous sommes, nous, des rebelles et des impies dignes de toutes les foudres ecclésiastiques pareeque nous avons regardé comme non avenue une prétendue décision qui n’était qu’une fraude judiciaire parfaitement