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choses saintes ! Voilà comme ils trompent les ignorants au nom de Dieu ! Or de deux choses l’une : ou ces prêtres n’ont pas la foi qu’ils prêchent et se moquent des choses les plus sacrées, ou ils sont dans la plus épouvantable ignorance de leurs devoirs.[1] Mais les Évêques ferment toujours les yeux parceque ces excès vont au soutien de la politique qu’ils affirment ne pas avoir ; mais ils savent bien arrêter au premier mot le prêtre qui blâme la politique qu’ils affirment toujours ne pas avoir. On consent même à dire

  1. La dernière élection du comté de Québec nous a montré une fois de plus le Clergé sous le jour le plus odieux possible : car à l’arrogance de son opposition envers le candidat libéral, à la honte des insultes brutales et personnelles qui lui ont été adressées en chaire, les curés du Comté, à une ou deux exceptions près, ont joint l’hypocrisie et la fausse représentation préméditée des faits. Et chose remarquable, ils ont agi avec ensemble ; ils se sont entendus pour signer des protestation et des circulaires où l’odieux des affirmations fausses le dispute à l’hypocrisie de la rédaction.

    Tout le monde n’a pas compris de suite l’objet de la protestation que ces Messieurs ont fait circuler avant l’élection. Plusieurs personnes se sont dit, et j’étais un de ceux-là : « Ah voilà quelque chose de bien ! » mais dès la semaine suivante il nous a fallu dire : « Mais c’était donc un acte impudent de tactique hypocrite !  ! Ces curés n’ont donc écrit que pour tromper !  ! » Et cela s’est trouvé vrai !  ! Qu’ont gagné les curés du Comté de Québec à se vouer ainsi au mépris de tous les hommes sérieux du pays ; à s’être ainsi affichés comme exemple honteux à éviter plus tard et à flétrir pour toujours ?

    Leur protestation contre la corruption a donc été une hypocrisie puisqu’ils ont soutenu le seul parti qui a fait la corruption ; et leur circulaire subséquente, dans laquelle ils ont osé dire que le parti conservateur s’abstenait d’exercer la corruption, était donc une fausseté qui saute aux yeux aujourd’hui, dont personne ne doute, dont tous les gens qui ont lu les écrits, puis connu les actes, sont fortement scandalisés ! Tous ces prêtres du Comté de Québec qui n’ont parlé que pour déguiser leur pensée et tromper le public seront nécessairement

    cloués au pilori de l’histoire pour leur duplicité ! Cela fait-il du bien au Clergé ?

    Mais il y a quelque chose de plus grave que l’écart des subalternes et leur mépris audacieux de toutes les règles de la franchise et de la bonne foi ; c’est l’intervention directe et active de l’administrateur du Diocèse ! Quoi ! l’Archevêque approuve la circulaire de l’Évêque de Rimouski et l’indique au Clergé comme règle à suivre dans les élections, et son propre grand vicaire profite de son absence pour se moquer du document épiscopal ! De quel grâce M. le grand vicaire reprochera-t-il dorénavant aux diocésains de Québec de ne pas tenir compte des instructions de l’Archevêque ? Quoi ! dès que celui-ci est absent, son propre grand vicaire se rit de ses prescriptions ! Mais c’est précisément là l’acte du bambin de collège qui fait une équipée parceque le maître d’étude a été appelé un instant à la porte !

    Un prêtre de grande valeur personnelle me disait il y a plusieurs années : « Nous restons toujours enfants par quelque côté. » Exemple : ce grand vicaire d’un âge raisonnablement mûr pourtant, qui fait des siennes quand son supérieur est à Rome.

    L’élection de Québec de 1873 restera l’une des taches, l’une des hontes du Clergé du pays, car il y a eu entente chez cinq sur six des curés du comté pour tromper les électeurs et donner le change au public éloigné. Le Clergé du Comté aura aussi produit ce beau résultat dans le pays de jeter un louche grave sur le chef du Diocèse qui se joint à un autre Évêque pour affirmer que certains actes sont absolument interdits aux curés, et qui ne punira peut-être pas les coupables comme ils le méritent, son propre grand vicaire et administrateur étant l’un d’entre eux.

    Ce que j’ai dit un peu plus haut, que l’on est venu, par cette circulaire de l’Évêque de Rimouski au secours du parti conservateur, tout en ayant laissé de tout temps dormir la vraie doctrine quand le parti libéral en eût profité, est-il donc complètement vrai ? Voilà des actes publics et officiels du Clergé du comté de Québec, approuvés par l’Administrateur, qui sont pour nous une preuve que l’on n’applique les vrais principes que pour le profit et avantage d’un seul parti politique. Serait-il donc impossible d’attendre du clergé l’impartialité ordinaire ? Quoi ! voilà un homme qui s’est montré toujours grave, sage et sensé, compromis par son propre représentant ! Et l’on n’entendra peut-être jamais dire que ce représentant aura reçu la leçon qu’il mérite ! Le système serait-il donc désespérément mauvais puisque les plus fermes et les plus sages y succombent à la tâche ?

    Je citerai ici un petit fait peu important en apparence, mais qui montre parfaitement ce que devient dans le Clergé le sens ordinaire de la justice.

    Dans une des paroisses de ces magnifiques environs de Québec qui forment l’un des plus splendides panoramas du monde, paroisse dont on aperçoit le clocher de tous les points de Québec, existe un couvent de religieuses destiné à l’éducation des jeunes filles. Comme la prière de l’innocence monte au Ciel sur les ailes des anges, on a fait prier les petites élèves pour la victoire de la bonne cause. Toutes ces petites filles de six à dix ans se rendaient parfaitement compte, naturellement, de la néces-