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— iv —

Il y a plusieurs années que l’ultramontanisme parle seul au milieu de nous et exprime presqu’autant de principes faux qu’il imprime de phrases. J’ai cru qu’il était temps de montrer et les vices du système et l’hypocrisie des écrivains qui le prônent sans jamais oser le présenter tel qu’il est.

Je sais qu’en parlant hautement et franchement, et en disant la vérité toute nue sans me préoccuper des systèmes ni des hommes, je soulèverai de graves colères ; mais je déclare ici à mes amis et à mes ennemis que je suis prêt à rencontrer ceux-ci où, quand et de la manière qu’ils le voudront, en assemblée publique ou autrement, et à monter point par point, détail par détail, combien ils trompent un public peu au fait de ces questions. Je prendrai le droit chrétien tel que défini par les bulles des Papes, et nous verrons si ce peuple-ci même, si profondément catholique, acceptera ce droit chrétien. Qu’y a-t-il de plus exagéré en fait d’ultramontanisme que le parti catholique belge ? Eh bien, depuis dix ans, ce parti a répudier, par ses principaux orateurs dans les chambres nationales, tout le droit chrétien tel que l’ultramontanisme le comprend. Le parti ecclésiastique belge a formellement reculé devant l’application du droit chrétien défini par le Syllabus et l’Encyclique de 1832 ! Eh bien, je ne crains pas de dire qu’en Canada aussi, avec les explications voulues de part et d’autre, il n’y a pas une portion du peuple qui acceptera le droit chrétien dans le sens ultramontain.

Voilà ce que je suis venu dire à mes compatriotes, car il faut que le pour et le contre soient connus sur toutes les questions, et surtout sur celles qui ont rapport à l’idée primordiale entre toutes de la souveraineté nationale

Il est essentiel que le peuple sache où les feuilles ultramontaines veulent réellement le faire arriver. Les peuples, pas plus que les individus, ne peuvent se décider sagement sur l’exposé d’un seul côté des questions. On ne juge pertinemment un principe que quand on connaît bien toutes ses conséquences. On ne juge pertinemment un système que quand on sait bien tout ce qu’il comporte. On ne juge pertinemment un parti que quand on connaît bien toutes ses tendances, quand on est complètement au fait de ce qu’il veut réellement. Et la tactique ultramontaine est de toujours voiler habilement tous les points de vue opposés aux idées du parti ; et quand celui-ci voit un livre où l’on démontre ses erreurs, ses torts, ses supercheries ou ses crimes, il défend tout simplement de le lire, ce qui est bien plus commode que de le réfuter. Et quand je prononce le mot supercherie, je ne le fais qu’après m’être parfaitement préparé à prouver la chose.

Je le dis donc sans la moindre hésitation : la presse cléricale de ce pays trompe le peuple. Elle ne lui dit pas les choses telles qu’elles sont ; elle ne lui développe pas ses principes tels qu’ils sont. Les hommes qui la dirigent ne disent presque jamais tout ce qu’ils savent, et trop souvent disent le contraire de ce qu’ils savent.

Ils ne visent qu’à produire un effet donné, et si c’est aux dépens de la vérité historique, tant pis pour la vérité historique, et on la relègue dans son coin.

S’il est une chose prouvée au-delà de tout doute, c’est que toute l’histoire écrite au point de vue ultramontain est une falsification d’un bout à l’autre. Je prouverais cela sans difficulté au besoin et mon seul embarras serait l’abondance des faits et des preuves.

J’avais aussi un autre motif pour faire entendre un peu le langage de la vérité indépendante à un Évêque. Nous avons vu depuis un an quels terribles antagonismes ont surgi au sein du Clergé ; nous avons vu avec quelle passion, quelles exagérations de langage, le parti ultramontain a traité des Évêques, des prêtres et des établissements religieux. Nous avons vu l’esprit de parti entre ecclésiastiques poussé jusqu’aux limites du possible. Nous avons vu des prêtres en calomnier d’autres avec un parti-pris qu’aucun laïc n’eût pu atteindre. Or, après les diatribes sans fin que toute la presse religieuse s’est permises vis-à-vis de