Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, troisième partie.djvu/283

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Rappelons-nous encore ce qui a été observé de la liaison qui s’établit entre nos idées, à mesure qu’elles ont été travaillées, élaborées, combinées ensemble sous mille aspects divers. Elle est un effet de la mémoire, cette liaison ; elle est en quelque sorte la mémoire elle-même ; elle fait que nous ne pouvons, qu’on me passe cette expression, toucher à une seule de nos idées, sans que le mouvement se propage plus ou moins à une infinité d’autres qui y sont liées. C’est comme un clavessin dont toutes les touches auraient quelque adhérence entr’elles : elles s’ébranleraient réciproquement. Une idée ne nous revient donc jamais absolument pure et isolée ; elle est toujours accompagnée d’une foule d’accessoires qui l’altèrent en concourant à l’impression totale ; et ce qu’il y a de pis, ce mouvement ne se propage pas toujours de la même manière : il se porte tantôt plus d’un côté, tantôt plus de l’autre, suivant les différentes circonstances ; ensorte que les accessoires ne sont pas toujours les mêmes, et que l’idée principale en est diversement altérée, ou, ce qui est la même chose, devient à chaque fois une nouvelle idée que nous prenons pour la même, parcequ’elle est toujours revêtue du même signe.