Page:Deulin - Les Contes de ma mère l'Oye avant Perrault.djvu/106

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tout à fait aussi obscure et aussi confuse que sa nourrice la lui a contée à lui-même autrefois pour l’endormir. »

L’anonyme n’eût peut-être pas tant insisté, si l’auteur de Peau d’Ane, qui avec ses contes en prose trouvera si bien la mesure, n’avait pris, ici comme pour Griselidis, un trop grand soin d’introduire la vraisemblance dans ces récits populaires qui s’en passent la plupart du temps. Nous avons vu que deux versions italiennes cachent l’héroïne, la première, dans une figure de bois articulée, la seconde, sous l’apparence d’une énorme citrouille ; nous verrons tout à l’heure que la version allemande de Grimm se contente de couvrir ses épaules de fourrures et sa figure de suie, sans s’inquiéter si cet accoutrement et ce masque suffisent pour déguiser une princesse. Quant à la version napolitaine, avec sa métamorphose en ourse par le moyen d’un petit bâton, elle donne raison à l’anonyme au point de faire croire qu’il la connaissait.

Il y a une autre critique qu’il oublie d’adresser à Perrault. Ainsi nous comprenons très-bien dans Cendrillon qu’on se mette en quête de la ravissante inconnue qui a perdu sa pantoufle, mais à quoi bon cette recherche pour la bague de Peau d’Ane ? Le prince se doute parfaitement d’où elle vient. S’il est si malade qu’on n’ose rien lui refuser, que n’envoie-t-il tout droit chercher celle qui doit le guérir ?