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Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/197

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ment giratoire, pour retomber quand ce mouvement diminuait ou cessait. Mais les cavaliers infatigables, enlevés par une formidable musique, enivrés par les parfums s’exhalant des toilettes féminines violemment secouées, ne laissaient guère de repos à ces pauvres falbalas… et le gigantesque serpent de valseurs continuait toujours à dérouler ses anneaux de couples enlacés.

Paul Champfort subissait, plus que tout autre, l’enivrement général.

Le contact de la femme aimée, de cette malheureuse Laure qu’il allait perdre à jamais dans quelques heures ; l’entraînement irrésistible de la cadence ; les notes éclatantes des cuivres, où se mariaient les sons moelleux des clarinettes et les trilles aigus des violons ; ces effluves magnétiques qui s’échappent des prunelles animées des femmes ; et par-dessus tout, l’haleine tiède et haletante de sa danseuse, lui arrivant au visage par bouffées aromatiques… tout cela lui monta au cerveau comme une fumée d’or et lui donna le vertige.

Il arriva même un moment où, perdant tout contrôle sur lui-même et dominé par un irrésistible besoin d’épanchement, il se baissa vers l’oreille de Laure et lui souffla ardemment : « Oh ! je t’aime ! je t’aime ! »

La jeune fille leva vers son cousin un regard brûlant, sentit courir dans ses veines un frisson de fièvre, puis, faiblissante et pâle, murmura :

« C’est assez. Je me sens tout étourdie… Retirons-nous. »

Champfort obéit.

Il abandonna la valse et conduisit sa cousine, la soutenant de son bras droit, dans une pièce contiguë, où il la déposa sur un canapé.