Page:Dick - Le Roi des étudiants, 1903.djvu/84

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étonnement qu’à l’encontre de bien des jeunes filles en pareil cas, Laure devenait de plus en plus bizarre, se drapait de plus en plus dans sa sombre mélancolie, à mesure qu’approchait le jour fatal…

À leurs yeux, cette belle jeune fille gardait dans son cœur quelque secret terrible et, plutôt que de le dévoiler, marchait stoïquement à l’autel, comme d’autres marchent au sacrifice.

Mais ses amis clairvoyants – en bien petit nombre, du reste – se gardaient bien de laisser paraître au dehors cette pénible impression et se contentaient de conjecturer "in petto".

Il aurait donc fallu que la veuve du colonel Privat, pour se renseigner exactement sur ce qui se passait dans le cœur de sa jeune fille, eût d’abord un soupçon, puis, guidée par cet indice un peu vague, que son instinct maternel, doublé d’une observation attentive, la mît sur la piste de la vérité…

Malheureusement, l’excellente femme, comme nous l’avons dit, n’était rien moins qu’observatrice ; et, d’ailleurs, sa légèreté naturelle ne lui avait pas permis de s’arrêter longtemps sur les réflexions qu’avaient fait naître chez elle les récentes étrangetés du caractère de sa fille.

Il ne faut pas croire que cette insoucieuse légèreté masquait un mauvais cœur et que les délices d’une vie opulente avaient étouffé, chez Mme Privat, les sentiments sacrés de la maternité.

Ce serait là une étrange erreur.

La riche veuve, au contraire, raffolait de ses deux enfants ; elle eût, sans hésiter, sacrifié des sommes folles pour satisfaire le moindre de leur caprice… Mais la Providence, qui lui avait prodi-