Page:Dick - Les pirates du golfe St-Laurent, 1906.djvu/47

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— Hein !… Qu’est-ce que c’est ?… C’est-il toi, Jeannot ?

Jeannot était le petit nom du fils Blouin.

À cette question, qui établissait clairement l’absence du susdit Jeannot, Thomas eut un tressaillement de joie et répondit de sa plus câline voix :

— Non, non, père Blouin : c’est moi, une de vos connaissances, Thomas Noël : Ouvrez vite : je suis trempé jusqu’aux os.

Thomas exagérait… Il n’avait de mouillée que sa vareuse et son pantalon, et encore… pour la frime, selon sa manière de parler.

Tout de même, ayant entendu ce nom de Noël qu’il connaissait bien, le gardien n’eut aucune hésitation et ouvrit sa porte.

Thomas pénétra aussitôt à l’intérieur du logis et, se secouant des pieds à la tête, — ce qui fit tintinnabuler ses bouteilles, — il dit joyeusement :

— Nom d’un phoque, père Blouin, comme vous vous barricadez !… Craindriez-vous les voleurs, par hasard ?

Le père Blouin eut un gros rire.

— Les voleurs ! dit-il avec un haussement d’épaules : il n’y a, outre mon garçon et moi, que les goélands qui fréquentent ces parages.

— Alors pourquoi vous enfermez-vous à double tour ?

— Affaire d’habitude, jeune homme. D’ailleurs, ma porte ferme mal, et il vente si fort !

— Oh ! quant à ça, j’en sais quelque chose, puisque, tel que vous me voyez, je suis en panne à terre, tandis que ma goélette file vers le Sablon.

— Ah ! ah !… Mais tu me conteras tes aventures tout à l’heure. Commence par enlever ta vareuse, qui me semble avoir bu plus d’eau de mer que d’eau-de-vie de St-Pierre.

— C’est que ma vareuse, si elle n’en a pas bu, elle en contient tout de même du « St-Pierre. »

— Au fait, tu me parais lesté comme une goélette contrebandière.