Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/70

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Au même instant, il s’élança par-dessus la rampe dans le couloir au-dessous, et il n’était pas relevé sur ses jambes, que Barnabé était à ses côtés. Le second chapelain et quelques membres des Communes, qui étaient là à supplier le peuple de se retirer, se retirèrent précipitamment. Et aussitôt, poussant un grand cri, la foule se jeta des deux côtés pêle-mêle contre les portes, pour assiéger en règle la chambre.

En ce moment, où un second effort allait les mettre en face de leurs ennemis sur la défensive à l’intérieur, et faire inévitablement couler le sang dans une lutte désespérée, on vit la foule par derrière lâcher pied, sur le bruit qui circula de bouche en bouche, qu’un messager était allé par eau chercher des troupes, qui, déjà se formaient en lignes dans les rues. La populace, qui n’était pas curieuse de soutenir une charge dans les étroits passages où elle était bloquée, se mit à s’en aller avec autant d’impétuosité qu’elle était venue. Barnabé et Hugh furent entraînés dans le courant, et là, à force de jouer des coudes, de lutter à coups de poings, de piétiner sur ceux qui tombaient en fuyant ou d’être piétinés à leur tour, ils finirent, eux et la masse dont ils étaient entourés, par s’écouler petit à petit dans la rue, où débouchait justement en toute hâte un gros détachement de gardes à pied et de gardes à cheval, balayant devant eux la place avec tant de rapidité, qu’il semblait que la populace fondait sur leurs pas.

Au commandement de : « Halte ! » la troupe forma ses rangs à travers la rue. Les émeutiers, haletants et épuisés à la suite de leurs derniers efforts pour se tirer de peine, en firent autant, mais d’une manière irrégulière et désordonnée. L’officier qui commandait la force armée vint à cheval en toute hâte dans l’espace qui les séparait, accompagné d’un magistrat et d’un huissier de la chambre des Communes, auxquels deux cavaliers s’étaient empressés de prêter leur cheval. On lut le Riot Act[1], mais pas un homme ne bougea.

Au premier rang des insurgés se tenaient Barnabé et

  1. Loi contre les émeutes, dont lecture est faite aux rassemblements avant de commander le feu.