Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


Éva descendit ; nous sortîmes tous les trois, et je n’en parlai même pas à cette bien chère amie.


CHAPITRE XV.

Dépôt sacré.

Un matin, après avoir terminé toutes les allées et venues qu’exigeaient les soins du ménage, je me promenais dans le jardin avec Éva, lorsqu’en tournant les yeux du côté de la maison, j’aperçus une ombre qui s’y introduisait et qui me parut être celle de M. Vholes. Comme précisément nous parlions de Richard et qu’Éva me disait son espérance de le voir bientôt renoncer à ce procès, à cause de l’ardeur même qu’il y avait apportée, je me gardai bien de parler à ma pauvre amie de l’ombre que je venais de reconnaître ; mais il y avait à peine quelques minutes que le procureur était arrivé, lorsque Charley, sautant par-dessus les plates-bandes et glissant au milieu des fleurs, me cria, du plus loin qu’elle m’aperçut :

« Miss, voulez-vous venir au salon pour parler à monsieur ? »

Je dis à Éva que j’allais bientôt revenir, et je demandai à Charley s’il n’y avait pas un gentleman avec M. Jarndyce. La chère enfant, dont la syntaxe faisait peu d’honneur à ma manière d’enseigner, me répondit :

« Oui, miss ; celui qu’a venu à Chesney-Wold avec M. Richard. »

Il était impossible de voir deux êtres plus dissemblables que M. Vholes et mon tuteur. L’un, franc et ouvert, ayant la poitrine large, la voix pleine et sonore, se tenant droit et vous regardant en face ; l’autre, froid et dissimulé, rétréci des épaules et légèrement voûté, ayant la voix creuse et une certaine manière d’articuler ses mots comme un poisson qui bâille.

« Vous connaissez M. Vholes, Esther ? » me dit mon tuteur sans y mettre infiniment d’urbanité.

L’avoué se leva, ganté et boutonné comme à son ordinaire, et se remit sur sa chaise en regardant le parquet à quelques pas devant lui.

« M. Vholes, continua mon tuteur en jetant un coup d’œil de défiance à l’homme noir, ainsi qu’à un oiseau de mauvais au-