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Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/464

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une si jolie et céleste créature, que je doutai enfin moi-même de la possibilité de la faire descendre à ces soins vulgaires de l’existence. Je me serais volontiers comparé à un monstre qui s’est introduit dans le paradis d’une jeune fée. J’étais un monstre, en vérité, d’avoir effrayé et fait pleurer celle qui, déjà rassurée et rendue à son naïf enfantillage, commanda à Jip de se tenir sur ses jambes de derrière, et, sur son refus, quoiqu’une rôtie dût être sa récompense, menaça de lui appliquer la théière sur son museau boudeur.

On venait d’apporter le thé sur un plateau. Après le thé, Dora s’accompagna de sa guitare et chanta quelques-unes de ses romances favorites avec une grâce si affectueuse pour moi, que je me convainquis de plus en plus que j’étais un monstre.

Cependant, j’interrompis encore le chant de ma jeune fée, en répondant à je ne sais plus quelle proposition que fit Miss Julia Mills sur la journée du lendemain :

« — Demain, » dis-je, « je serai levé à cinq heures ; car, à présent…

» — Méchant que vous êtes ! » s’écria Dora, « ne vous levez pas à cinq heures ; c’est absurde…