Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/254

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mère aurait été fière de vous… Adieu, Monsieur. »

Elle me tendit la main avec une dignité raide. Le contact de cette main aurait dû brûler la mienne, si l’orgueil qui ulcérait son cœur ne lui eût en même temps donné, à ce qu’il semblait, la force d’en apaiser les battements et de tirer sur son visage un voile d’impassibilité.

En m’éloignant le long de la terrasse, je ne pus m’empêcher d’observer avec quelle insensibilité apparente ces deux femmes, que je laissais dans leur solitude, contemplaient l’horizon envahi peu à peu par les ténèbres de la nuit. Au fond du tableau, les premières lumières allumées dans la ville éclairaient çà et là le brouillard qui s’étendait au loin, comme les vagues amoncelées d’un sombre océan la veille d’une tempête. J’ai eu des raisons pour me rappeler ce spectacle, pour me le rappeler avec épouvante ; car, avant que je revinsse de nouveau aux mêmes lieux, une mer réelle avec toutes ses terreurs ne réalisa que trop le pressentiment avec lequel je les quittais.

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