Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/267

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de cette brave femme était à la mer ; elle garda le secret sur l’étrangère, dont elle prit soin pendant plusieurs semaines qu’elle resta malade chez elle ; car bientôt Émilie eut une fièvre, une fièvre étrange, que les savants expliquent sans doute mieux que moi, et qui lui fit soudain oublier la langue de ce pays. Elle ne pouvait plus parler que la sienne, que personne autour d’elle ne comprenait. Émilie se rappelle comme un rêve le temps qu’elle resta là, parlant toujours sa propre langue, se croyant toujours sur la plage de Yarmouth, disant à ceux qui l’entouraient d’aller avertir son oncle qu’elle se mourait et le suppliait de lui envoyer une seule parole de pardon. Il lui semblait aussi entendre sous la fenêtre, tantôt l’homme qui l’avait voulu retenir prisonnière et qui voulait la ramener, tantôt l’autre qui la cherchait aussi ; mais tout ce qu’elle entendait et tout ce qu’elle voyait, c’était confusément, comme assourdie par un bruit lointain, éblouie par une rouge lueur de flamme, sans pouvoir s’en rendre compte et sans savoir si elle devait rire ou pleurer. Après ce long délire survint un sommeil, et, après ce sommeil, un réveil si paisible qu’elle ne distinguait plus d’autre son que le murmure de la mer bleue et