Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/291

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les lames s’amonceler puis retomber soudain, qu’elles allaient submerger la ville ; en se retirant avec fracas, elles se creusaient de profonds ravins sur la plage, comme si elles eussent voulu miner la terre. À peine quelques-unes s’étaient-elles brisées avant d’atteindre le rivage, que leurs fragments semblaient animés par la même fureur de destruction qui les rassemblait pour former un nouveau monstre : c’était une rapide succession de métamorphoses tumultueuses, d’humides montagnes changées en vallées, de vallées changées en montagnes, de sons effrayants qu’on aurait pris pour le craquement d’un monde ; — le rivage fantastique de l’horizon tombait et se relevait avec ses tours et ses remparts de vapeurs, les nuages pourchassaient les nuages, les vagues pourchassaient les vagues, et la nature entière paraissait au moment d’être engloutie par l’abîme.

Ne rencontrant pas Cham parmi les spectateurs de cette tempête mémorable, — car on s’en souvient encore à Yarmouth et on la cite comme la plus grande qui ait jamais soufflé sur la côte, — je revins sur mes pas vers sa demeure : elle était fermée. Personne ne répondant à mes coups de marteau, je me rendis,