Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/348

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J’ai maintenant retracé des événements de mon absence tout ce que j’ai cru nécessaire pour relier les diverses parties de ce récit, à une seule exception près. J’ai fait cette réserve, non pour supprimer aucune de mes pensées secrètes, puisque, je l’ai dit ailleurs, ce sont mes Mémoires que j’écris ici. J’ai voulu seulement différer cette révélation de moi-même jusqu’à présent, et je dois la commencer.

Je ne saurais pénétrer assez complètement le mystère de mon propre cœur, pour savoir à quelle époque précise j’entrevis l’espérance d’obtenir d’Agnès la plus douce consolation de mon infortune. Il y eut cependant un moment où se réveilla en moi cette réflexion, que ma jeunesse folle avait laissé de côté le trésor de sa tendresse, réflexion que je bannissais autrefois comme injuste et ingrate envers une autre ; espérance qui eût été coupable, lorsque je ne devais plus désirer qu’elle pût se réaliser… Eh bien ! alors même que je me voyais si triste et si seul en ce monde, je me reprochai encore ce regret tardif.

Si, immédiatement après ma perte, j’étais resté près d’Agnès, ma faiblesse m’eût trahi, et peut être, en m’éloignant de l’Angleterre, avais-je redouté cette pensée, quelque vague