Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/376

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existence. Depuis trois ans que j’avais quitté l’Angleterre, je revoyais pour la première fois un feu de charbon de terre ; mais, devant les cheminées du continent, j’avais trop souvent pu comparer mes espérances détruites à cet amas de cendres qui tombe des bûches du foyer.

Ah ! du moins, je pouvais enfin me retracer le passé avec tristesse, mais sans amertume, et contempler l’avenir avec courage. Plus de foyer domestique pour moi dans l’acception la plus douce du mot ; celle à qui j’aurais pu inspirer une affection plus tendre, n’avait pour moi, et parce que je l’avais voulu, qu’une affection de sœur ; elle se marierait, elle aimerait un mari et des enfants, en ignorant toujours mon amour secret pour elle. Il était juste que je portasse la peine de ma passion irréfléchie. Je ne récoltais que ce que j’avais semé.

C’est ainsi que je raisonnais avec moi-même, me fortifiant dans la résolution de prendre mon parti, de dompter mon cœur, de me réduire, auprès d’Agnès, au rôle calme qu’elle avait rempli auprès de moi, — lorsque, tournant la tête, je crus reconnaître un personnage que j’aurais pu croire tout-à-coup sorti