Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/438

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passait par les lèvres d’Agnès me touchait plus que tout le reste !

Une fois la semaine, au moins, je montais à cheval et j’allais passer l’après-midi à Cantorbéry. Je revenais ordinairement coucher à Douvres ; car la même pensée me poursuivait toujours, et j’avais besoin du mouvement de l’aller et du retour pour me distraire de mes regrets, de mes espérances déçues, de la tristesse surtout avec laquelle je prenais congé d’Agnès. Aussi j’aimais à chevaucher la nuit et à rêver aux combats que j’avais livrés à mon cœur pendant ma longue absence.

J’exprimerais peut-être plus exactement la vérité, si je disais que, dans le silence de la nuit, j’écoutais les échos de mes anciennes pensées. Je les avais repoussées dans un lointain vaporeux, et j’acceptais le rôle que je m’étais imposé comme le seul qui pût me conserver la confiance d’Agnès. Je ne cherchai pas à franchir le cercle que j’avais tracé autour de moi, me contentant de me dire de temps en temps que j’aurais pu cependant avoir dans Agnès une compagne plus tendre encore qu’une sœur, à peu près comme, après avoir épousé Dora, je me figurais autrefois ce que j’aurais désiré que fût ma femme. Je m’en tenais