Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/440

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il y avait eu quelque contrainte ou plutôt une réticence mutuelle sur ce sujet délicat. Sa pensée, je le crois, avait en partie deviné la mienne, et elle comprenait parfaitement le silence que je gardais lorsque, parfois, nous passions la soirée ensemble devant le feu, selon notre vieille habitude, demeurant là des heures entières sans rien nous dire, mais n’ayant aucun besoin de nous traduire par la parole ce qui nous préoccupait tous les deux.

L’époque de la Noël étant arrivée, et Agnès ne m’ayant encore fait aucune confidence nouvelle, je fus tourmenté d’un doute qui m’avait déjà plusieurs fois ému. Aurait-elle deviné, elle aussi, le véritable état de mon âme ! Craindrait-elle de me causer une trop vive peine en me révélant son propre secret ? Si cela était, mon sacrifice était nul, je ne remplissais plus mon devoir envers elle. Je résolus d’éclaircir ce doute cruel, bien résolu à renverser cette barrière si elle existait.

C’était… je ne saurais oublier la moindre circonstance de cette explication… c’était un des jours les plus sévères de l’hiver. La neige, qui était tombée la veille, couvrait la terre d’une couche peu profonde, mais durcie par la gelée. Le vent soufflait du Nord. Le matin,