Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/443

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« — Que le ciel la bénisse, et son mari aussi ! » dit ma tante.

Je fis écho aux paroles de ma tante, descendis l’escalier, m’élançai sur mon cheval et partis. Je ne pouvais plus différer l’explication que j’avais résolu de provoquer.

Je voudrais retracer les moindres incidents de cette journée : les parcelles de glace que le vent détachait des herbes et me jetait au visage, le galop mesuré du cheval sur le chemin retentissant, les sillons gelés des champs, les tourbillons de neige qui s’engouffraient dans les carrières à chaux qu’on avait ouvertes à droite et à gauche, le chariot chargé de foin qui s’arrêtait sur la hauteur et dont l’attelage exhalait un nuage de vapeur en agitant ses grelots sonores, enfin les blanches ondulations de la campagne du comté de Kent se dessinant sur l’horizon grisâtre comme sur une immense ardoise.

Je trouvai Agnès seule. Les petites pensionnaires étaient allées passer la nuit dans leurs familles ; elle lisait solitairement au coin du feu. Ayant quitté son livre en me voyant entrer, elle prit sa corbeille à ouvrage et alla se placer dans l’embrasure d’une des vieilles croisées où je m’assis auprès d’elle.